De retour du lac Song-Kol
16 septembre 2008
   
Une fois de plus, nous voilà à Bishkek ! On vient de récupérer nos visas de transit Russe, on va fêter ça dès l'apéro de tout à l'heure.
Petite parenthèse donc, après nos aventures autour du lac Song-Kol. Pour situer un peu, ce lac se trouve à 3000m d'altitude, au bout d'une piste de 70km qui passe par un col perché à 3300m, long d'environ 30km et large d'une vingtaine, ses eaux sont en moyenne à -3°c l'été jusqu'à -20°C l'hiver : le camion est monté sans problème, c'était la première fois que j'utilisais les rapports 4x4 "courts", impressionnant de grimper des côtes aussi escarpées avec autant de facilité, tout cela encore une fois au milieu de paysages montagneux féériques et avec ma merveilleuse copilote. On a été un peu déçus à notre arrivée : à cette altitude la végétation se fait rare, on nous avait parlé d'un lieu encore plus majestueux que le lac d'Issik-Kol, on avait plutôt l'impression d'arriver sur une immense plaine aride, avec de l'eau au milieu... certes les chaînes de montagnes au loin agrémentaient le panorama, mais vraiment, à part les animaux, les yourtes et les quelques humains, y'a rien qui dépasse !
On s'est rendu compte à travers des photos qui dataient de quelques semaines que c'est beaucoup plus beau avant les premières gelées : c'est le paradis des Edelweiss, on voit ces fleurs blanches des montagnes en forme d'étoile partout et les pâturages sont d'un vert beaucoup plus lumineux que les teintes beiges / marron qu'on a pu voir nous-mêmes une fois qu'on y était... Bref, première impression un peu décevante, en revanche, que d'aventures en 3 jours !!




Lac Song-Kol vu par satellite

(image google map)

Toujours accompagnés de la famille Verney, puis des Belges qui nous ont rejoint plus tard, on a posé les camions au beau milieu de ... rien, à quelques kilomètres du rivage : pour l'anecdote, on pensait être à quelques centaines de mètres à peine, impression trompeuse dans cette immensité, il y avait en fait pas loin de 5 bornes, on s'en est rendu compte le premier soir en ayant la riche idée d'aller rincer notre linge au bord du lac : au bout d'une heure on avait pas fait la moitié du chemin alors qu'on pensait déjà être de retour à ce moment-là... avec nos 10 kilos de linge mouillé chacun, on avait l'air malins quand on est revenu sur nos pas. (Ah oui, précision, on a changé de mode de lavage : on se sert maintenant d'un gros bidon de 30 litres, on le remplit au 2/3 de flotte, on rajoute linge et lessive, et une fois accroché au camion on laisse faire le roulis et l'état des routes pour secouer tout ça, reste plus qu'a rincer et étendre : pour 3 euros le bidon au bazar, notre "machine à laver" se révèle très efficace)

Le village de Yourtes au bord du lac
A cheval autour du lac Song-Kol, reperez
les 4 touristes... c'est ceux qui ont des lunettes.
A 800m de notre bivouac se trouvaient 2 yourtes entourées de chèvres, de vaches, de moutons et surtout de chevaux : on nous avait dit que pour une ballade, il suffisait de s'adresser à n'importe qui sur place et de négocier un tarif, chose faite pour Jeff, Juliett (le couple Belge) et nous-mêmes pour le lendemain. RDV à 9h et service à domicile : ils nous ont amèné les chevaux aux camions...mais à 9h Kirghiz, c.-à-d. vers 11h, notre guide Mourat nous a paru bien sympathique, on s'est même permis quelques galops sans trop le prévenir...on aurait pu mettre ça sur le compte de la barrière linguistique, mais y'a même pas eu besoin. Une bonne ballade autour du lac en passant par le "village de yourtes" (au nombre d'une douzaine, avec autant de troupeaux et de chiens) et avec Athos qui nous a suivi tout le long, en aboyant de temps en temps, mais surtout en veillant à ce qu'on reste bien groupés, marrant comme ses instincts de berger sont vite revenus. En fin de journée, Mourat nous a invité à prendre le thé dans sa yourte : et là, surprise, on retrouve les Verney dans la Yourte voisine, celle du frère de Mourat, Jannuik (surnommé"Jean-Claude", croyez-le ou non, en référence, a priori, a JC VanDamme pour son côté bourrin/bagarreur), l'occasion de se retrouver tous ensemble avec cette grande famille : les 2 frangins, leurs femmes, 2 beaux-frères, un autre frère, "Jean-Claude junior", 4 ans, et le petit dernier de Mourat, bambin de 4 mois, qui porte le nom du lac. On a vidé des litres de Tchai, pour ma part de Kumis également - du lait de jument fermenté, très légèrement alcoolisé, ils le gardent dans un tonneau qu'ils remuent matin et soir pendant les 3 ou 4 mois ou les juments qui "poulinent" donnent du lait, les autres n'ont pas trop aimé, en ont pris quelques gorgées par politesse, moi j'ai vidé des bols... - tout ça agrémenté de "naan", des petits pains plats, de beurre, de sucre, et de "crème" au fort goût de vache. On a pu voir comment "fonctionnait" la yourte, comment ils se chauffaient en brûlant les bouses récoltées et stockées au fur et à mesure, ce qu'ils mangent, comment ils dorment, et finalement comment ils utilisent tout ce qui se trouve à leur portée... 10 fois on a essayé de partir, 10 fois on a repris du pain, du thé et du kumis...
Jean-Claude junior à cheval
Tous ensemble dans la yourte de Mourat
Les nuits ont été très fraîches (une bonne préparation pour la Mongolie) mais très reposante, est-ce qu'on dort mieux à 3000 m ? En tout cas on s'essouffle plus vite. Le lendemain, revoilà les frangins qui débarquent à cheval avec un nouveau "grand frère" (des dents en or plein le sourire), l'un des beaux-frères de la veille et Jean-Claude junior à dos d'âne (ce gamin était d'ailleurs impressionnant, à 4 ans il montait le cheval de son père tout seul, les jambes dépassant à peine de la selle, les rênes dans une main, la cravache dans l'autre, s'acharnant à donner des pieds et à pousser des "Tchoi ! Tchoi !" pour aller plus vite - du trot, du galop - et ça ne semblait inquiéter personne que ce petit bout d'homme aille d'un endroit à un autre perché à une hauteur avoisinant 3 fois sa taille, bringuebalant comme une marionnette sur un bestiau qui se déplace aussi vite qu'une bagnole... certes, il fallait le porter pour descendre, ce qui valait au père quelques caprices à chaque fois, mais quand on parle de patrimoine génétique, ce gamin avait déjà l'allure, à 4ans, d'un vrai cavalier), ils apportaient avec eux l'inévitable litre de Kumis et pendant que Jean-Claude me taxait des cigarettes, les enfants Verney ont pu monter un peu à cheval, accompagnés d'abord, et puis tout seuls. Le temps d'une grosse frayeur : Bastien s'est retrouvé embarqué par le cheval qu'il montait, ce dernier s'étant mis en tête (avec l'aide probable d'Athos qui courrait derrière...) de rentrer aux Yourtes tout seul, au galop d'abord, puis au triple galop, avec Bastien dont on voyait le T-shirt blanc sautiller à chaque foulée et a qui on ne pouvait que crier "Accroche toi, Accroche toi !!!". Heureusement que la selle avait un bon pommeau : Bastien a tenu bon, quant à Jean-Marc et Isa, les parents Verney, ce n'est que le soir qu'ils ont réalisé à quel point le petit l'avait échappé belle...
Après quelques échanges de cadeaux, les frangins nous ont proposé de passer à leurs yourtes en fin de journée pour reprendre le Tchai chez eux
Au milieu passe la piste qui mène à Song-Kol
De leur côté, les Verney ont préféré rejoindre le rivage nord du lac en camion pour passer la soirée en famille et voir ce que nous avions vu la veille à cheval. Avec les Belges, sur le coup des 17h on se met en route pour les Yourtes, résolus à rentrer avant que la nuit tombe (la faune locale comporte aussi des loups...même s'il y avait peu de chances qu'on en croise, on y pense quand même...) et, fort de l'expérience "Tchai" de la veille, décidés à être fermes au moment de partir. Raté. C'est le ventre rempli, tendu, à la limite de vomir, et essoufflés comme des asthmatiques qu'on a finalement regagné nos camions respectifs à 23h passées : après le thé, les frangins nous ont montré leurs troupeaux, on est allé voir la traite des vaches, et on n'a pas pu couper à l'invitation à dîner de Jean-Claude, ça faisait déjà 2 heures qu'on était chez eux, on avait remis 3 fois nos vestes et autant de fois nos chaussures, on est retourné 3 fois s'asseoir... Est venu le repas, un large plat de pâtes "fait maison" (les femmes kirghiz n'ont rien à envier aux italiennes...) agrémenté de mouton, de pommes de terre et d'un bouillon difficile à identifier mais délicieux. Naturellement chaque fois qu'un bol ou qu'une assiette se vidait, elle était aussitôt remplie. Toute la famille était autour de la table basse (on mange à genou ou en tailleur) et piochait au fur et à mesure.
A la fin du repas, les hommes nous ont proposé d'aller dehors pour "digérer", en faisant des signes des bras comme si on allait courir. Ben ça n'a pas raté : on est tous allés dehors, hommes et femmes confondus, sous le clair de lune, l'un d'eux a rapporté une patte de chèvre (oui oui, une patte de chèvre...), on se mettait tous en ligne, dos aux étendues herbeuses et la patte était balancée dans notre dos le plus loin possible, une fois qu'on entendait le "ploc" de la patte qui retombait, il fallait se retourner, courir le plus vite possible pour la trouver (je rappelle que c'est la nuit...) et la ramener derrière la ligne. Ce qu'on savait pas c'est que ça se jouait un peu comme le rugby, à 2 équipes, quand le premier trouve la patte dans la pénombre, il doit crier "Ad-Kamei !!" et les autres se ruent dessus pour lui chiper la patte, on peut la passer à quelqu'un de sa propre équipe, on peut se retrouver à six sur la patte à tirer comme des ânes, tout ça en se battant comme des chiffonniers, Julie s'est laminé les mains, j'ai perdu un bout de peau de mon index, mais on a franchement bien rigolé !! Par contre pour la digestion, ce n’est pas terrible... et à cette altitude, ce type de jeu vous met vite K.O. Après on a fait une sorte de "jeu du furet", assis tous en rond, avec un bonnet qu'on lâche dans le dos de quelqu'un et qui doit se lever aussi sec pour se mettre à poursuivre le "furet" autour du cercle avant que ce dernier ne se rassoit à sa place...bref, c'est quand sont remontées les premières pâtes, agrémentées de mouton, qu'on a réussi à souhaiter une "Bonne nuit" des plus polie, à les remercier et à regagner nos camions...

   
Pendant ces 3 jours autour du lac, j'ai un peu bricolé, Julie s'est lancée dans la confection de pain (très réussi d'ailleurs pour une cuisson sur gazinière!), on a beaucoup lu tous les deux et on s'est vraiment fait plaisir !!
Demain on repasse la frontière Kazakh pour rejoindre Almaty et finir notre parcours de visa : cette fois-ci le mongol !! On remontera ensuite toute la région où les Russes procédaient à leurs essais nucléaires il y a quelques décennies, autant dire qu'on ne s'y attardera pas trop, et on devrait passer la frontière Russe le 26/09 si tout va bien.

Julie se joint à nouveau à moi pour vous embrasser bien fort, c'est vrai que du fait que je tape au clavier un peu plus vite (déformation professionnelle n'est-ce-pas...), je me charge des mails le plus souvent, mais c'est bien notre périple à tous les deux !!
A bientôt !

David Julie et Athos